Ça n'arrive pas juste aux autres.

La vie n'est pas faite pour mourir, on meurt souvent, bien entendu, car la vie est si fragile.

-Luc De Larochellière

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À l'âge de 25 ans, je suis tombée en chute libre.

Une nuit de janvier 2020, pour moi c'était terminé.

Quelques heures plus tard, j'entrais à l'urgence.

J'ai tout de suite été placée dans une salle et par la suite dans un lit. L'infirmier m'a dit: tu dois retirer toute tes choses et les mettre dans un sac. Ils ont barré les portes. Je l'ai compris quand ma meilleure amie est arrivée à l'hôpital et qu'elle a tenté d'entrer dans la salle où j'étais. Quand l'infirmier est revenu, il m'a dit: tu dois retirer tes bijoux. Je me souviens d'avoir dit à Julie; «mais pas mon collier!» Ma chaîne est très importante pour moi. Je joue souvent avec quand je suis stressée et que ça ne va pas. Quand je n'ai pas de collier, je suis un peu perdue. L'infirmier m'a expliqué que c'était pour ma sécurité.

On m'a ensuite emmenée dans l'aile psychiatrique. Dans une grande salle vitrée avec d'autres patients qui étaient eux aussi dangereux pour leurs vies. Déjà que les hôpitaux sont des endroits froids et sans vie, la salle dans laquelle j'étais, était encore plus froide. Il n'y avait rien d'autre que des lits et des rideaux qui séparaient les lits. Dans notre «salle de bain privée» il n'y avait pas de miroir, pas de rangement pour le papier de toilette ni le papier brun et la porte ne se verrouillait pas.

J'ai eu le droit de demander une deuxième couverture parce que j'avais très froid. Quand l'infirmière est venue me porter la couverture elle a vue que j'avais mes bas. Elle m'a demandée de les enlever. D'ailleurs, quand j'ai eu mon congé de l'hôpital, ils ne trouvait plus mes bas! J'ai rencontré le médecin, plus précisément un psychiatre. On m'a remit une prescription pour des médicaments, je vous en parlerai aussi dans un autre texte.

À ma sortie de l'hôpital, je suis allée dormir chez ma meilleure amie. Le lendemain, Julie donnait une formation de Zumba. Il n'était pas question que je reste seule. Je suis allée faire des photos pendant environ trois heures. Je me souviens que certaines personnes de la formation avaient demandé comment j'allais.

- «Bien...»

-«Annie, tu sembles fatiguée?»

-«Disons que je n'ai pas beaucoup dormi…»

-«Lâche donc ton chum pendant la nuit!»

J'ai ri.

Ma tête disait: «Si seulement…»

Les photos suivantes on été prises le lendemain de ma tentative de suicide. J'avais les bras couverts de blessures, j'avais perdu beaucoup de poids. Cette journée là, j'ai dit à mon filleul: «Marraine te fait la promesse d'aller mieux, de s'aider et de rester dans ta vie pour toujours. Je t'aime fort mon cœur.»

Ce n'est qu'un bref résumé de ma période sombre. Cette période dans laquelle j'ai beaucoup pleuré, je me suis détestée, j'ai ressenti de la colère, je me suis remise en question encore et encore. Je me souviens qu'une personne m'a dit: «C'est bizarre que tu n'ailles pas bien toi, tu étais toujours celle qui aide les gens!» Cette période s'appelle la dépression. J'aimerais tellement que ce sujet ne soit plus tabou. C'est un sujet qui devrait être abordé dans les écoles et avec les parents.

Dépression n.f

''La dépression majeure est une maladie mentale qui se caractérise par une perte de plaisir et une humeur triste soutenue pendant plusieurs semaines. De plus, la personne souffrira de problèmes de sommeil, de changement au niveau de son appétit, de perte de concentration, d’énergie, d’intérêt ou de motivation. Les pensées sont négatives avec une pauvre estime de soi, une culpabilité démesurée, une tendance à voir tout en noir, un pessimisme et un manque d’espoir pour l’avenir. Ceci mène parfois à des idées suicidaires. (Association des médecins psychiatres du Québec - Dépression)''

Ce qui est difficile avec la maladie mentale, c'est qu'on ne la voit pas. Je me souviens avoir pris l'autobus pour me rendre à mon appartement. J'étais assise, une dame qui est entrée dans l'autobus. Mon premier réflex normalement aurait été de me lever et de lui céder ma place. Sauf que cette journée là, ça n'allait vraiment pas et je n'avais pas envie de laisser ma place. Il y a surement eu du jugement de la part des autres personnes ou des regards sur moi. Sauf que personne ne savait à quel point j'avais mal à l'intérieur de moi, parce que ça ne se voit pas.

Lors d'une activité à laquelle j'ai participée. On nous a demandé de représenter le chao!

Tout de suite, j'ai pensé à ma dépression! Je suis une personne qui a besoin de se sentir structurée, en contrôle de la situation et organisée. La dépression; c'est tout le contraire de moi! Tout d'abord, les émotions! Vivre des émotions que je ne comprenais pas. Passer de la joie à la tristesse en moins de cinq minutes. La dépression, c'est aussi un cercle vicieux, une roue sans fin. Notre tête est en permanence en train de réfléchir, de se créer des scénarios et de voir tout en gros. C'est encore pire la nuit. J'ai aussi vu la dépression comme un casse-tête. C'est un peu comme une métaphore; nous avons en notre possession toutes les pièces de nos problèmes, mais nous n'avons pas encore complété le casse-tête qui est en réalité la solution.

On dit souvent que pleurer c'est pour les faibles, mais je pense que c'est plutôt d'avoir été fort trop longtemps. Alors, il n'y a pas de honte à aller chercher de l'aide. J'ai suivi une thérapie de presque deux ans pour me sentir mieux. J'ai fait cette thérapie pour trouver des pistes de solution à mes problèmes et aussi pour affronter mes démons. Aujourd'hui, deux ans plus tard, je vais bien et c'est vrai. J'ai aussi appris que c'est important de s'entourer de bonnes personnes, que la famille et les amis sont aussi là dans les moments plus difficiles. Ils ne sont pas juste là quand tout est beau. J'ai aussi appris que tu as le droit d'avoir des journées plus difficiles, puis tu n'es pas toujours obligé d'afficher un sourire. Nous avons droit à nos moments de vulnérabilité et ça ne fait pas de toi une personne faible.

Prends soins de ta santé mental!

Voici des ressources pour toi ou pour une personne qui en aurait de besoin :

• Tel-jeunes : ligne d’écoute pour les jeunes de 5 à 20 ans : 1 800 263-2266 (https://www.teljeunes.com/accueil)

• La ligne d’aide et de prévention du suicide : 1 866 APPELLE ou 1 866 277-3553

• Revivre – Association québécoise de soutien aux personnes souffrant de troubles anxieux, dépressifs ou bipolaires (https://monrelief.ca/)

• Réseau avant de craquer – Fédération d’organismes voués au mieux-être de l’entourage d’une personne atteinte de maladie mentale (https://www.avantdecraquer.com/)

• Association canadienne pour la santé mentale (https://cmha.ca/fr/)

• Mouvement Santé mentale Québec (https://www.mouvementsmq.ca/)

• Association des médecins psychiatres du Québec (https://ampq.org/)