À toi, qui m'a volé mon enfance.
- Annie Theriault
- 25 juil. 2022
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 janv.
Tant et aussi longtemps que vous ne pardonnerez pas, cette personne ou cet événement occupera gratuitement un logement précieux de votre esprit.
-Isabelle Holland
Je suis née un beau jour de printemps. Sans l'avoir demandé, je suis arrivée parmi vous! Sauf que malheureusement tu avais déjà des problèmes. Ma garde vous a vite été retirée. Tu avais déjà levé la main sur maman, mais aussi sur moi. Un si petit bébé rempli d'innocence, qui ne demandait qu'à être aimé. Sauf que les choses ont pris une tournure bien différente.
Je n'avais que deux ans papa, quand ils sont venus me chercher en plein milieu de la nuit. Je n'avais que deux ans quand mon petit monde de bébé s'est envolé. Je n'avais que deux ans quand tu me frappais. Je suis partie dans une famille durant un an. Je suis trop jeune pour me souvenir de ce qui s'est passé durant cette année-là. Par contre, je me souviens du moment que tu es venu me récupérer dans ma famille d'accueil. Je rentrais à la maison avec toi. Tu l’avais dit que tu reviendrais me rechercher. Est-ce que notre vie de famille allait commencer pour de bon?
Au début, tout allait pour le mieux, sauf que tu as recommencer à boire. Tu as donc recommencé à frapper maman. Ensuite, ça été mon tour… Au début, seulement des claques en me disant d'arrêter de pleurer. Tu es devenu de plus en plus violent par la suite. Après ça, le coup de poing jusqu'à m’en fendre la lèvre. Il y a eu la règle d’un mètre à l’endos des deux cuisses, j’en tombais par terre. Finalement, il y a eu la ceinture sur mon petit corps âgé seulement de 3 ans.
Ensuite, nous en sommes arrivés à ce soir-là. Ce soir que je ne souhaite à aucun enfant sur cette planète. Tu es entré dans ma chambre. Tu m'as réveillée en me disant de ne pas faire de bruit. Tu m'as assise sur tes cuisses et tu as pris ma minuscule main et tu l’as déposé sur ton sexe bien dur. Tu m'as dit que c'était notre petit secret, moi qui étais ta petite princesse. Je n'ai pas compris ce qui venais d'arriver ce soir-là. Tu es revenu à plusieurs reprises pour me demander de jouer avec. Puis une nuit, les choses ont été différentes. Tu as retiré ton pantalon. Tu m'as dit de le mettre dans ma bouche. Tu as pris ton plaisir à fond et t’as laissé ta semence me couler dans la bouche. C'est devenu ton activité préférée. C'était encore une fois notre secret à toi et moi! On ne devait le dire à personne. J'étais ta princesse et ton beubé comme tu aimais tant le dire. Tu m'aimais si fort…

Les choses ont changé quand nous sommes allés chez Thérèse. Je jouais avec des '’LEGO’’. J'ai lancé un '’LEGO’’ de l'autre côté de la clôture. Je suis sortie de la cour pour aller le chercher, tu m'as alors ramassée et tu m’as lancée sur la chaise. Tu m'as donné plusieurs coups. Un homme est sorti de sa voiture. Tu m'as bien dit de fermer ma gueule et d'arrêter de pleurer. Je n'avais que cinq ans. Je venais de vivre deux années de mon enfance, qui allait me manquer à vie, sauf que je ne le savais pas encore.
L'homme de la voiture a décidé d’appeler la police. Tu as dû comprendre ce qui se passait, car nous sommes partis sur le champ. Quelques heures plus tard, tu étais en état d'arrestation. Tu m'as dit: Papa va venir te chercher, je n'ai rien fait de mal. Ce soir-là a été la dernière fois que nous avons été ensemble.
Au début, nous avions des visites supervisées. On avait tellement de plaisir à jouer avec les jeux de la salle d’attente. Te dire aurevoir était super difficile. Par la suite, nous avons fini par avoir des visites à la maison. Le soir, tu venais te placer devant le cadrage de ma porte de chambre et tu me regardais sans cesse. J'avais souvent peur quand j'ouvrais les yeux et que je te voyais là. Puis un soir, je me suis mise à genou devant toi. Tu as joui dans ma bouche. J'avais les yeux pleins d'eau. Tu m'as dit ce n'est pas grave et tu m'as serré dans tes bras. Quand la nuit tombait et que nous étions chez toi j'avais peur je me cachais dans ma chambre. Les visites ont continué un bon moment, j'avais peur mais si heureuse à la fois de te voir. Pendant une visite, tu as frappé Yan alors que nous passions la fin de semaine chez toi. Sauf que cette fois j'ai ouvert ma bouche et j'ai dit ce qui c'étais passé. Les visites ont pris fin immédiatement.
Cette même année, tu as demandé à me rencontrer aux bureaux de la DPJ. Tu m'as expliqué que la DPJ te privait de tout et que tu étais tanné de ce système qui te faisais chier. Tu m'as remis une boite de quatre chocolats en forme de coquillages et 50$. Tu m’as dit: Papa va partir et on va se revoir à tes 18 ans, avant que dieu vienne me chercher. J'étais assise en face de toi et je pleurais. Tu m'as pris dans tes bras et tu m'as serré si fort. Aujourd'hui je n’aime pas trop donner des câlins, j'ai toujours peur de me faire abandonner. Tu as dit aussi que je resterais toujours ton beubé et tu es sorti du bureau. Je me suis rendue à la fenêtre où je t’ai vu prendre ton vélo et partir sans jamais te retourner. Encore à ce jour, je me souviens de l'endroit et du jour où tu m'as abandonnée. On s'est revue quelques années plus tard. Je t'avais manqué. Tu étais content de voir la fille que j'étais devenue.
Ça aura pris une tentative de suicide en 2020, pour faire remonter en moi tous ces souvenirs que j'avais cachés et jamais dit à personne. Je me souviens que j'étais en crise et j'ai tout écrit quand j'ai eu terminé. Je suis allée porter le livre à Martin qui était dans le salon. Il a lu tous ces mots remplis d'horreur que j'avais mis sur cette feuille. Il est venu me prendre dans ses bras et cette nuit-là j'ai beaucoup pleuré.

Qu'elle petite fille naïve j'ai été de t'aimer mon papa à moi. Au final, tu n'étais rien d'autre qu'un monstre. Un homme qui a détruit le monde magique de l'enfance que j'aurais dû connaitre. Tu as été un homme rempli de méchanceté. Un homme qui me remplit de dégout. Tu étais si sale.
Tout ce que tu m'as fait vivre et endurer. J'en en garde des traumatismes assez sévères. J'ai peur de dormir la porte de la chambre ouverte. Je fais aussi ce cauchemar: celui de me sentir observé. Tu es caché sur le bord du mur, tu rentres dans ma chambre et tu embarques sur moi. J'ouvre les yeux tu as un couteau dans les airs. Je rêve que tu veux me tuer!
J'ai aussi peur des mouvements brusques. J'ai peur de me faire frapper à nouveau. J'ai peur des hommes qui lèvent la voix contre moi.
Je doute tellement de la femme que je suis, je suis donc ben belle. Sauf que j'arrive difficilement à accepter le compliment venant de quelqu'un d'autre.
C'est le monde que tu m'as fait découvrir, un nuage de noirceur. J'aurais pu décider de tout abandonner. Sauf que j'ai décidé de ne pas être comme toi et j'ai décidé d'affronter la situation. Par contre, je ne peux plus t'affronter, car tu as quitté ce monde d'un cancer du cerveau en septembre 2018. Ta mort m’a beaucoup affectée. Je n'ai pas trop compris pourquoi, car je souhaitais tellement ton décès.
Au salon funéraire j'ai pleuré énormément. Je m'en voulais de pas être venue te voir assez souvent, de pas avoir pris assez de temps pour toi. Je t’ai même dit que je te pardonnais, car tu avais su reconnaitre tes erreurs. Sauf que je me suis menti à moi-même. Au fond de moi, j'aurais tellement aimé être ta petite fille, j'aurais voulu t'aimer tout simplement comme on devrait aimer son père. J'ai décidé d'arrêter de fermer les yeux. Je te déteste. Je t'en veux. Je te hais. Tu es un monstre.
J'ai écrit une lettre de six pages quand tu es décédé et je suis allez l'enterrer devant ta tombe. C'était pour moi la fin d'un chapitre.
Je me souviens d'avoir terminé la lettre en disant que la petite fille au fond de moi t'aimais. Tu me manques et mon seul beau souvenir avec toi était nos soirées feux d'artifices. Je t’ai aussi dit que tu n'étais pas plus mon papa, mais mon géniteur. Je t’ai dit que tu m'avais fait assez de mal et que dorénavant je te laissais partir loin de moi.
En septembre cette année, ça va faire 4 ans que tu es parti de ce monde et tu ne me manques pas. Je ne pense pas à toi, tu es bien loin pour moi et c'est parfait comme ça!
Je vais très bien aujourd'hui et j'ai affronté mes démons et cela fait en sorte que je vais beaucoup mieux dans ma vie!

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